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Vers la fin du VIe siècle, plusieurs groupes de moines irlandais débarquèrent en Europe avec un projet : redonner au continent la foi chrétienne authentique, déviée et contaminée par les guerres et les invasions ; rétablir « la foi catholique qui est préservée en Irlande pure et sans pollution ». Voici ce que les plus célèbres d’entre eux ont écrit au pape Boniface IV : Colomban, de Bangor, le monastère le plus connu et le plus strict d’Irlande. Comme d’autres compatriotes, Colomban est attiré par l’aventure : prendre la mer, se lancer sur le continent. Il a étudié la Bible et les Pères anciens, mais aussi les grands de la littérature païenne : de Virgile à Sénèque, Horace, Ovide.
Le roi Gontrano de Bourgogne permit aux moines de s’installer dans les ruines d’un pays détruit par Attila, et c’est là qu’ils donnèrent vie à ce qui serait une abbaye très célèbre, Luxeuil. Ils apportent la rigueur de Bangor, l’ascétisme grossier cher à Colomban, en profond contraste avec l’ascétisme bénédictin qui commence son voyage en Europe (Benoît est mort vers 547 et est proche et amical de l’homme dans ses vertus et ses faiblesses, avec son attention éclairée à la personne.
Mais ici, en Gaule, tout est dur et sanglant. Les héritiers de Clovis s’arrachent des terres, des biens et des sujets avec toutes leurs armes. Aujourd’hui, ils fondent une église et demain ils ordonnent un massacre. D’ennemis, bien sûr. Mais ici, les frères sont aussi des ennemis. Et même des grands-mères, comme la reine Brunechilde, rusées et impitoyables pour leur part, puis destinées à une mort horrible par leurs proches.
À tout cela, Colombano réagit par le commandement du plus strict désintérêt. Il interdit même à ses moines de prononcer les paroles, le miens, les vôtres, et pour ceux qui se trompent, ils sont battus. Une aversion radicale pour la politique de l’avoir, pour le mode de vie même des puissants. Et cela ne peut pas rendre sa vie paisible. De plus, un désaccord sur la date de Pâques le met également en désaccord avec le clergé local (« Nous ne sommes pas en Irlande ici ! »). Il devra donc quitter Luxeuil et errer vers l’Allemagne, la Suisse et enfin l’Italie. À Milan, il est accueilli par le roi lombard Agilulf et son épouse Teodolinda. Des ariens, pas des catholiques. Mais intéressé par une politique de trêve, et attiré par la figure de l’abbé irlandais, par ses événements en Gaule. Ils lui font don d’un terrain sur les rives de la Trebbia, dans la province de Piacenza. Et c’est là qu’est née l’abbaye de Bobbio : la dernière fondée par lui (apôtre de la foi et aussi de la culture classique) pour devenir un centre de foi et d’étude.
À Bobbio, Colomban est rejoint par une ambassade du roi franc Clotaire II : tout est fini, tout est oublié, l’abbé retourne à Lusuil ! Mais l’austère moine d’Irlande resta en Italie, dans le monastère nouvellement naissant. Il lui consacra la dernière année de sa vie et y mourut le dimanche 23 novembre 61 5, et son corps y resterait pour toujours.